samedi 18 février 2012

Amertume


Source de la photo: peinture de Lazhar

Je ne veux plus goûter  la saveur de ce monde, il a le goût du fromage suranné et de la pourriture frémissante. L`insipidité des spectres ambitieux qui déambulent dans les rues pestilentielles m`empêche de digérer les comportements obséquieux… Il me restera toujours comme un arrière-goût amer.

Et ce nez…comme je voudrais me l`amputer pour éviter de sentir l`odeur nauséabonde que dégage vos valeurs impures. La perfidie de vos identités méphitiques aura même eu la peau de ce pauvre Cyrano. Lavez-vous de l`immonde âpreté que vous portez ne serait-ce que pour ne plus respirer l`âcreté de l`infamie.
 Il me vient l`envie de vous parfumer d`arômes dégageant justice et moralité.

Ma télé étant toujours en mode « mute », je n`ai plus  à écouter les discours autocratiques débités par des politiciens ignares et tyranniques de surcroît. Les éviter n`est pas ma façon de fuir la société pseudo-politique mais c`est un moyen de conserver le peu de lucidité qu`il me reste. Par ailleurs, je ne suis plus en mesure d`écouter vos malheurs futiles. Mes épaules se sont, fatalement, affaissées sous le poids de vos pleurs inutiles; les seules mélancolies auxquelles j`aurais dû compatir sont celles du Condamné  ou d`Abélard. Au final, si j`étais dépourvue d`ouïe, je m`en porterai plutôt bien quoique Schubert et Ferré me manquerait.
 

"Tout m`accablait: pourquoi devais-je

conserver encore un regard,

quand plus rien ne s`offrait à moi,

où mon regard eût pu trouver la moindre joie?" –Sophocle


vendredi 17 février 2012

Fragments d`une âme étiolée





 
Alors que des enfants dorment sur des paillasses fourchues; je déplore la grandeur de mon matelas qui me rappelle chaque matin, par sa froideur, que le rêve d`un mariage moral s`estompe peu à peu. Je n`ai aperçu l`Amour qu`à travers la nature céleste qui fait preuve de bonté en nous offrant des paysages paradisiaques. La grandeur de ce monde ne rend insignifiant que celui qui le regarde d`en bas; aussi j`ai toujours voulu aller dans l`espace dans le seul but d`être plus grande qu`eux. De voir cette petite sphère bleue et de me dire " Il y`a vraiment des êtres minuscules là-dedans qui rêvent de Pouvoirs?". Et l`idée me semblerait si ridicule que j`en rirais. J`espérais ne plus éprouver de crainte envers cette humanité monstrueuse. Seulement les rêves ne sont que des illusions qui mettent un peu de couleur sur des visions en noir et blanc.

Les hommes sentent le besoin de dominer leurs semblables afin d`affirmer une existence qui, au final, n`est que l`ombre de ce qu`ils sont : des fantômes flétris errants parmi leurs propres débris. Solitude dans un environnement néfaste par son aspect despotique… Mes yeux n`exprimant que le vide de mon âme, c`est la Sympathie du ciel ombrageux, gonflé d`amertume, que je reçois en guise de consolation.
La Pitié du marbre ruisselant de larmes déversées par des nuages honteux me fige dans le temps; c`est une histoire qui ne sera pas entendue. Mon prénom  mourra sur les lèvres des fossoyeurs tandis que la terre m`enveloppera de sa cape chaleureuse. 
...
Fraternité d`une nuit dépourvue d`étincelles, l`orage, quant à lui, déchaînera tout mon fiel.
Je serai pluie, vent, marrée; je redeviendrai nature et je pourrai alors accompagner vos émois comme elle le fait si bien pour moi.
 

vendredi 10 février 2012

Nos sens sont trompeurs?


Suite à mon questionnement provoqué par l'article "Existence" j'ai voulu faire l'étude qui suit portant sur une courte synthèse des théories sensitives de cinq grands philosophes.
Aussi, ce n`est qu`une esquisse servant à illustrer différentes positions à propos des sens humains.

La sensation est la perception que l`on a d`une chose résultante de données fournies par un ou plusieurs organes sensoriels.

Platon affirme qu`il est impossible de connaître le monde sensible (visible) lorsque la connaissance dérive de nos sensations. Effectivement, par le monde sensible nous n`avons accès qu`aux ombres et aux images dérivant des objets matériels et physique que ceux-ci projettent. Par ailleurs, nous ne pouvons avoir une connaissance certaine résultante de ces images ou ombres puisqu`ils ne suscitent que la faculté d`imaginer. Par conséquent, cette « connaissance » ne peut pas être fiable car elle résulte de croyances (elle porte sur des choses incertaines donc, elle peut être vraie ou fausse) et d`opinions. Toutefois, il est possible de connaître le monde sensible une fois que l`on est libéré des sens pour connaître les Formes véritables (voir dualité entre monde sensible et monde intelligible chez Platon).

 Contrairement à Platon, il n`y a pas de dualisme entre le monde sensible et le monde intelligible chez Aristote, la connaissance sensible et la connaissance intelligible « portent sur différents aspects des mêmes objets ». Pour lui, il y a une continuité entre les sens (par l`air, le feu et l`eau) et les objets du monde, ce qui fait que la perception est multi- sensorielle. Le sensible a une objectivité dans le monde car il est extérieur à nous. C`est donc nos sens qui peuvent engendrer l`imagination et puisque l`imagination est un élément nécessaire pour activer la faculté de penser, elle est indispensable et ne doit pas être rejetée comme le faisait Platon. Finalement, la théorie de la connaissance d`Aristote démontre que c`est à l`aide de nos perceptions sensorielles que l`on peut connaître et représenter le monde étant donné la hiérarchie (ou la continuité) qui existe entre la connaissance sensible (l`illusion) et la connaissance intelligible (la science).
En outre,  Descartes doute des sens puisque l`illusion de ceux-ci "porte à la fois sur les objets et sur le sujet lui-même". Elle n`est donc pas une source fiable pour la connaissance. Dans les Médiations métaphysiques, Descartes expose son idée par l`exemple du morceau cire : Celui-ci peut avoir l`air dur, froid et solide au premier abord. Or, il suffit de le chauffer pour que toutes ces qualités, observées antérieurement, disparaissent. Même si « cette chose » transformée devant moi a des aspects différents, elle n`en demeure pas moins de la cire. Par ailleurs, on peut conclure que ce n`est pas la perception qui peut expliquer ce qu`est la cire. En ce sens, il serait assez en accord avec Platon puisque lui aussi se méfiait de la perception sensorielle. Toutefois, Descartes croit que la perception produit une idée, certes elle peut être confuse et imparfaite, elle n`en demeure pas moins « un acte d`intellection » ce qui lui donne une direction convergente avec Aristote également.

Kant sépare radicalement la perception et l`entendement; la sensibilité est celle qui fournira les données à analyser (catégories du temps et de l`espace) et l`entendement sera celui qui déterminera si il y`a une vérité ou non. Malgré tout, la sensibilité délimite la raison puisque celle-ci ne peut rien chercher en dehors d`elle.

 Pour Locke, qui est un pur empiriste, les sens sont les sources premières de la connaissance. Il est contre les innéistes et affirme que l`esprit, à la naissance, est « une table rase » avant que toute expérience sensorielle ou réflective soit vécue. Les idées que nous tirerons de nos expériences sont les bases d`une connaissance qu`on acquiert avec le temps. Contrairement aux rationalistes, la sensation est primordiale dans la théorie de la connaissance des empiristes, puisqu`elle est la base des quatre différentes types d`idées (idées simples, idées complexes, idées de relation et idées abstraites) qui forment notre conception du monde.





mercredi 8 février 2012

Existence


C`était un de ces jours où la nature donne l`impression que l`été boudeur rechigne à l`idée de laisser la place à l`automne. Celui-ci, mécontent, soufflait alors ce vent dédaigneux et orgueilleux en but de chasser les derniers effluves de la période estivale. Le soleil méfiant, dardait sur les passants pressés quelques rayons douteux, comme s`il ne craignait d`être trop généreux de sa bonté chaleureuse. Agacés par le souffle sournois du mois de septembre, les arbres délaissaient leur parure colorée sur les trottoirs miteux. Cependant que le soupir impatient de l`automne se prolongeait, les nuages flemmards s`avancèrent ostensiblement au-dessus des montagnes et des ruines pour finalement déverser, stoïquement, des grappes d`eau sur la ville fatiguée. Toutefois, Paris ne semblait pas s`apercevoir des émois de la nature, elle continuait d`étinceler de ses milles éclats. La vanité de ces étincelles se reflétaient fièrement dans les yeux de la jeune journaliste fraichement diplômée que j`étais. L`une des villes les plus merveilleuses du monde, contenait en son enceinte l`histoire de ma propre vie. Paris allait me faire exister; j`étais prête à soulever les rangs, à dépasser l`entendement de la collectivité et à apprendre aux gens le sens de la réalité. Il y`avait des heures que j`étais sur les rivages de la Seine et je ne m`en lassais toujours pas. La pluie ne faisait que renforcer mon enthousiasme; le paysage me semblait quasi-irréel avec  des lumières qui brillaient telles des gouttes d`espoir. Je tentais de remplir mes poumons avec le maximum d`air parisien qu`ils pouvaient contenir.


Pas un souffle ne rentrait; j`avais l`impression que la brise traversait mon corps comme si « l`on » avait omis de me donner une existence matérielle. Ma réaction fût la plus banale qui soit : je tentais de provoquer une douleur physique quelconque. Mais je n`obtins aucune réaction potentielle de mes membres. C`est alors que je me rendis compte, que je ne pouvais m`observer moi-même (le fait de ne pas pouvoir pivoter la tête ne m`aidait pas à confirmer cela...). Une angoisse fondamentale m`étreignit la gorge : où étais passé mon corps? Si je n`avais pas d`existence physique, qu`est-ce qui me prouvait que j`avais une tête (ou une âme pour faire plaisir à nos théologiens).

Et je me sentis vraiment stupide. Mais alors là, c`est le genre de moment où l`envie coriace de vous fracasser le crâne contre une surface dure est si violente que vous vous demandez toujours, à la fin, ce qui a pu vous retenir. Bref, malgré le besoin frustrant de me suicider (il n`était cependant pas envisageable d`y répondre dans le cas où je me trouvais) je constatais une chose primordiale : je pensais. Par ailleurs, il est dit, que le fait même de penser prouve l`existence de l`âme n`est-ce pas? Sans trop s`attarder sur les faits philosophiques (le cogito cartésien n`a sans doute convaincu que l`auteur de la théorie lui-même et ses quelques disciples dévoués- dont moi-) je me rassurais; j`étais «âme »/ « tête pensante ». Et ce n`est plus l`angoisse qui me tenaillait l`esprit mais la tristesse de voir un paysage tant désiré, mis en contexte par une imagination fertile. Je n`ai jamais compris les personnes qui ronchonnent parce qu`on les sort des désirs censurés de l`inconscience. Personnellement, une fois que je prends conscience de l`irréalité des choses que je vois; je sors tout simplement de mon état de sommeil. Que les rues de Paris disparaissent plus rapidement qu`elles n`étaient apparues ne me gêne pas. Ce qui me déçoit c`est la façon humiliante dont j`ai pu me faire leurrer par mon imagination. Tout semblait si réel et imprégnant que j`ai fait confiance à une vision traitresse. En ce sens, je rejoins Descartes lorsqu`il dit : « j`ai quelques fois éprouvé que ses sens étaient trompeurs, et il est de la prudence de ne se fier jamais entièrement à ceux qui nous ont une fois trompés ».