dimanche 22 juillet 2012

Extérioriser pour mieux vivre?


Hoppla wir leben,  Berlin, 1927

Quand j`étais encore qu`une adolescente ordinaire, j`éprouvais une grande honte à engourdir mes pensées accablantes en collant mon front contre une surface glacée, alors que mes camarades, sans gêne, usaient de « produits » illicites ou de liqueurs enivrantes pour faire passer leurs frustrations du moment.  Jusqu`à un certain âge,  je ne les avais jamais enviés, puisque je me disais qu`au lieu de fuir la réalité comme eux, moi, je la vivais à fond. Seulement voilà;  actuellement, ces gens-là ont l`air de plutôt bien se débrouiller  au quotidien, alors que je n`ai pas encore fini ma propre déchéance. Je les observe dans leur apothéose génialissime et je me complais dans mon autodestruction houleuse.
Si, la glace pouvait encore être efficace sur les débris que projette mon esprit, je ne crois pas que j`aurais à me plaindre. Mais il me vient une question fondamentale; pourquoi ces salauds prétentieux qui passaient la soirée à se défoncer le crâne et griller le peu de cellules nerveuses qu`ils avaient s`en  sortent aussi bien à l`aide de ces moyens dégradent alors que la naïve, ou stupide, fille saine que j`étais, s`est détériorée au fil des années tandis qu`on avait approuvé son comportement « exemplaire »?

L`adolescence, c`est l`accablement de l`âme; elle se rend compte qu`elle a des choix à faire et qu`elle est en mesure de penser par elle-même sans qu`elle soit, nécessairement, obligée d`être guidée par un « autre ». Pascal disait que la plus grande maladie de l`Homme c`est cette « curiosité inquiète des choses qu`il ne peut savoir ». Or, combien se souvienne de toutes les questions inextinguibles qu`on peut se poser à l`adolescence? C`est innombrable. Enfin, sauf si on a la chance d`être idiot. Ainsi, les plus idiots sont les plus heureux. Quoi qu`il en soit, les frustrations, les peines et la souffrance viennent principalement des lacunes au peu de réponses qu`on récoltait ici et là. Seulement voilà, il y`a ceux qui comblent ce vide ontologique par les jeux, l`alcool, le sexe, la drogue… Maintenant, je vois cette débauche un peu comme une extériorisation des émotions et non seulement une tentative d`oubli partiel des problèmes comme je le croyais autrefois. Alors que celui qui rumine lucidement dans son coin tout au long de la journée et de la nuit, comme il ne sait pas trop quoi faire de sa douleur ou de ses spoliations, finit par intérioriser son mal-être. Après quoi,  il en fera de même avec toutes les calomnies et les irritations qu`il rencontrera tout au long de son parcours. Néanmoins, ce mal existentiel qu`il porte depuis trop longtemps, le gruge de l`intérieur et le conduit à sa propre hécatombe. Sans compter que cela lui sera très saumâtre et peut-être même impossible, d`apprendre à révéler ses émotions, quand il a porté, pudiquement, un fardeau dont il ne pourra pas se détacher aussi aisément.

Je ne sous-entends pas qu`il faut laisser « sex, drugs and rock`n`roll » aux adolescents pour qu`ils puissent suivre un développement favorable à leur existence future. Toutefois, si on pouvait arrêter de tancer les jeunes à chaque fois qu`ils élèvent la voix ou claquent des portes et laisser libre court à leurs exacerbations ou leurs chagrins- je ne crois pas que les oreilles puissent s`écorcher aussi facilement ou que des maisons s`abattent pour quelques claquements dans les murs.